Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 3.djvu/120

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le voyageur Desmarchais assure que de son temps l’or était si commun dans le pays d’Akra, qu’une once de poudre à tirer se vendait deux drachmes de poudre d’or.

Les marchandises d’Europe qu’on recherche dans le pays sont les toiles d’Osnabruck, les étoffes de Silésie, les baïettes, les saies, les perpétuanes, les fusils, la poudre, l’eau-de-vie, la verroterie, les couteaux, les petites voiles, les toiles rayées de l’Inde, et d’autres objets dont le goût s’est répandu parmi les Nègres. Ils les portent au marché d’Aboni, où l’on voit arriver trois fois par semaine une prodigieuse quantité d’autres Nègres, Akkanez, Aquambos, Aquimeras, Koakoas, qui achètent à fort grand prix ce qui leur est nécessaire ; car, ne pouvant obtenir la liberté de venir jusqu’aux forts européens, ils n’ont pas d’autre règle pour la valeur des marchandises que la volonté des marchands nègres d’Akra.

Parmi les chefs barbares dont les guerres et les brigandages troublent souvent le commerce du pays, les voyageurs parlent d’un Nègre nommé Ankoa, né avec des inclinations si féroces, qu’il ne pouvait vivre en paix : c’était d’ailleurs un monstre de cruauté. S’étant saisi, en 1691, de cinq ou six des principaux de ses ennemis, il prit plaisir, de sang-froid, à leur faire de sa propre main une infinité de blessures ; ensuite il huma leur sang avec une brutale fureur. Un de ses malheureux, qu’il haïssait particulièrement, fut lié par ses ordres,