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chapeaux, des bonnets, etc. Il ne manque d’aucune espèce de marchandises. Il donne les bedjis[1] comme du sable, et les liqueurs fortes comme de l’eau : sa vanité et sa fierté sont excessives : aussi est-il le plus belliqueux et le plus riche de tous les rois de cette grande région ; et l’on doit s’attendre qu’avec le temps il subjuguera tout le pays dont il est environné. Il a déjà pavé deux de ses principaux palais des crânes de ses ennemis tués à la guerre. Les palais néanmoins sont aussi grands que le parc Saint-James à Londres, c’est-à-dire qu’ils ont un mille et demi de tour.

» Le roi souhaite beaucoup qu’il me vienne des lettres de ma nation, ou toute autre marque de souvenir. Il regarderait comme une bassesse indigne de lui de prendre quelque chose qui m’appartînt. Je ne crois pas même qu’il voulût retenir les blancs qui viendraient à sa cour. S’il me traite autrement, c’est qu’il me regarde comme un captif pris à la guerre ; d’ailleurs il paraît m’estimer beaucoup, parce qu’il n’a jamais eu d’autre blanc qu’un vieux mulâtre portugais, qui lui vient de la nation des Popos, et qui lui coûte environ cinq cents livres sterling. Quoique cet homme soit son esclave, il le traite comme un cabochir du premier ordre : il lui a donné deux maisons, avec un grand nombre de femmes et de domestiques, sans lui imposer d’autre devoir que de raccommoder quelquefois

  1. Espèce de coquille colorée qui sert de monnaie aux Nègres, comme les cauris.