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la farine et les autres denrées ne me sont pas plus épargnés. Si le roi fait tuer un bœuf, ce qui lui arrive souvent, je suis sûr d’en recevoir un quartier ; quelquefois il m’envoie un porc vivant, un mouton, une chèvre, et je ne crains nullement de mourir de faim. Lorsqu’il sort en public, il nous fait appeler, le Portugais et moi, pour le suivre. Nous sommes assis près de lui pendant le jour, à l’ardeur du soleil, avec la permission néanmoins de faire tenir par nos esclaves des parasols qui nous couvrent la tête.

» Ainsi nous tâchons, le Portugais et moi, de nous rendre la vie aussi douce qu’il est possible, et surtout de ne pas tomber dans une tristesse qui serait bientôt funeste à notre santé. Cependant, comme je suis fort ennuyé de ma situation, je suppliai le roi, il y a quelque temps, de me remettre entre les mains du général de ses troupes, et de me faire donner un cheval pour le suivre à la guerre. Il rejeta ma demande, sous prétexte qu’il ne voulait pas me faire tuer. Ensuite, m’ayant promis de m’employer autrement, il m’ordonna de demeurer tranquille et de prendre garde à tout ce que je lui verrais faire. J’ignore encore quelles sont ses intentions. Son général même n’approuva pas l’offre que je faisais d’aller à la guerre, parce que, si j’étais tué, me dit-il, le roi ne lui pardonnerait pas d’en avoir été l’occasion. Depuis ce temps-là sa majesté m’a fait donner un cheval, et m’a déclaré que,