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timent, il vit deux autres Nègres qui se tenaient au bout d’un câble, la tête au-dessus de l’eau, fort effrayés du sort de leurs compagnons. Il les fit prendre dans sa pinasse ; et, montant à bord, il y trouva les Nègres fort tranquilles sous les ponts, mais les blancs dans la dernière confusion sur le tillac. Un matelot lui dit d’un air effrayé qu’ils étaient tous persuadés que la sentinelle de l’écoutille avait été massacrée par les Nègres. Cet effroi parut fort surprenant à Snelgrave. Il ne pouvait concevoir que des gens qui avaient eu la hardiesse de lui refuser leurs esclaves une heure auparavant eussent manqué de courage pour sauver un de leurs compagnons, et n’eussent pas celui de défendre le tillac, où ils étaient armés jusqu’aux dents. Il s’avança, avec quelques-uns de ses gens, vers l’avant du vaisseau, où il trouva la sentinelle étendue sur le dos, la tête fendue d’un coup de hache. Cette révolte avait été concertée par quelques Cormantins. Les autres esclaves qui étaient d’un autre côté, n’y ayant pas eu la moindre part, dormaient tranquillement dans leurs loges. Un des deux fugitifs qui avaient été arrêtés rejeta le crime sur son associé ; et celui-ci confessa volontairement qu’il avait tué la sentinelle dans la seule vue de s’échapper avec quelques Nègres de son pays. Il protesta même qu’il n’avait voulu nuire à personne, mais que, voyant l’Anglais prêt à s’éveiller, et trouvant sa hache près de lui, il s’était cru obligé de le