Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 5.djvu/117

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que nous voulions élever sur les bords du fossé un rempart de bois, à la hauteur d’un mur, pour accabler les ennemis à cette distance par la multitude des flèches et des zagaies. Personne ne comprit que des fascines, dont chacune surnageait sur l’eau, pussent former par le nombre un poids capable de remplir le fossé à l’aide des traverses et de la terre qu’on y mêle. On ne devina pas mieux l’usage des paniers et des hoyaux que Mendez fit apporter des villages et des bourgs voisins, d’où la guerre avait fait fuir les habitans. Tout le jour fut employé à ces préparatifs. Mendez parut sans cesse à côté du nauticor, qui le comblait de faveurs. Nous crûmes remarquer dans sa contenance un air de fierté qui s’étendait jusqu’à nous, et que nous ne pûmes souffrir sans murmure. Qui sait, disions-nous, dans quelles nouvelles disgrâces sa témérité peut nous engager ? Si son entreprise réussit mal, nous devons nous attendre à mourir par la vengeance des Tartares. S’il a le succès que nous désirons, il jouira de toute la faveur du khan, et notre plus grand bonheur sera peut-être de nous voir employés à le servir.

» Cependant toutes ses mesures furent prises avec tant de sagesse, que, dès le matin du jour suivant, l’armée fut mise en ordre de bataille, et divisée en plusieurs corps qui s’approchèrent des murs d’autant de côtés différens. Chaque division devait feindre de commencer son attaque avec aussi peu de