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Coja-Acem, Guzarate de nation, qui était sorti le matin du port pour aller à l’île d’Aynan. La dame indienne, confirmant leur idée, ajouta qu’elle avait vu à Légor ce redoutable mahométan ; qu’il se vantait d’avoir donné la mort à quantité de Portugais, et d’avoir promis à son prophète de les traiter sans pitié, parce qu’il accusait un capitaine de leur nation, nommé Hector de Sylveïra, d’avoir tué son père et deux de ses frères dans un navire qu’il leur avait pris au détroit de la Mecque.

» Nous apprîmes ensuite que cette dame était veuve d’un capitaine général qui s’était attiré la disgrâce du roi et le châtiment qu’elle déplorait. Sa fortune, qu’elle avait réparée par une sage conduite, la mettait en état de faire un riche commerce de sel. Elle venait d’une jonque qui lui était arrivée dans la rade, mais qui était trop grande pour passer la barre, ce qui l’obligeait d’employer une barque pour transporter son sel dans ses magasins. Elle s’arrêta le soir dans un petit village où elle fit prendre soin de nous pendant la nuit. Le lendemain elle nous conduisit à Légor, qui est cinq lieues plus loin dans les terres. Nous lui étions redevables de la vie ; mais, ne se bornant point à cette faveur, elle nous donna une retraite dans sa maison. Nous y passâmes vingt-trois jours, pendant lesquels nos blessures furent pansées avec des témoignages d’affection dignes de la charité