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cent sous. La tribu suivante est celle des femmes de débauche, dont on distingue deux sortes : l’une, de celles qui ne se prostituent qu’aux hommes d’une tribu supérieure ; l’autre, des femmes communes qui ne refusent leurs faveurs à personne. Elles tiennent cette infâme profession de leurs ancêtres, qui leur ont acquis le droit de l’exercer sans honte. Les filles de leur tribu, qui ont assez d’agrémens pour n’être pas rebutées de l’autre sexe, sont élevées dans l’unique vue de plaire. Les plus laides sont mariées à des hommes de la même tribu, dans l’espérance qu’il naîtra d’elles des filles assez belles pour réparer la disgrâce de leurs mères.

On fait apprendre aux plus jolies le chant, la danse, et tout ce qui peut leur rendre le corps souple. Elles prennent des postures qu’on croirait impossibles. « J’ai vu, dit Méthold, une fille de huit ans lever une de ses jambes aussi droit, par-dessus la tête, que j’aurais pu lever mon bras, quoiqu’elle fût debout et soutenue seulement sur l’autre. Je leur ai vu mettre les plantes des pieds sur la tête. » Tavernier dit : « Il y a tant de femmes publiques dans la capitale, dans ses faubourgs et dans la forteresse, qu’on en compte ordinairement plus de vingt mille sur les rôles du déroga. Elles ne paient point de tribut, mais elles sont obligées, tous les vendredis, de venir en certain nombre, avec leur intendante et leur musique, se présenter devant le balcon du roi. Si ce prince s’y trouve, elles dansent en sa présence ;