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commençaient à lui manquer. Cependant il n’y passa que deux heures, pendant lesquelles il prit aussi quelques informations sur sa route, qui servirent à nous faire sortir de la rivière par un détroit beaucoup moins fréquenté que celui de Sileupamor, par lequel nous y étions entrés. Là, nous fîmes cent quarante lieues pendant neuf jours ; et, rentrant ensuite dans l’anse de Nankin, qui n’avait dans ce lieu que dix ou douze lieues de large, nous nous laissâmes conduire pendant treize jours par le vent d’ouest jusqu’à la vue des monts de Conxinacau.

» Cette chaîne de montagnes stériles qui forment une perspective effrayante, l’ennui d’une longue route, la diminution de nos vivres, et surtout le regret d’avoir manqué nos plus belles espérances, jetèrent dans les deux bords un air de tristesse qui fut comme le présage de l’infortune dont nous étions menacés. Il s’éleva tout d’un coup un de ces vents du sud que les Chinois nomment typhons, avec une impétuosité si surprenante, que nous ne pûmes le regarder comme un événement naturel. Nos panoures étaient des bâtimens de rames, bas de bords, faibles et presque sans matelots. Un instant rendit notre situation si triste, que, désespérant de pouvoir nous sauver, nous nous laissâmes dériver vers la côte, où le courant de l’eau nous portait. Notre imagination nous offrait plus de ressource en nous brisant contre les rochers qu’en nous laissant