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Akbar. En arrivant du côté de Delhy, on rencontre, près d’un grand bazar, un jardin qui est celui de Djehan-Ghir, père de Schah-Djehan. Le dessus du portail offre une peinture de son tombeau, qui est couvert d’un grand voile noir, avec plusieurs flambeaux de cire blanche, et la figure de deux jésuites aux deux bouts. On est étonné que Schah-Djehan, contre l’usage du mahométisme qui défend les images, ait souffert cette représentation. Tavernier la regarde comme un monument de reconnaissance pour quelques leçons de mathématiques que ce prince et son père avaient reçues des jésuites. Il ajoute que dans une autre occasion Schah-Djehan n’eut pas pour eux la même indulgence. Un jour qu’il était allé voir un Arménien nommé Corgia, qu’il aimait beaucoup, et qui était tombé malade, les jésuites, dont la maison était voisine, firent malheureusement sonner leur cloche. Ce bruit, qui pouvait incommoder l’Arménien, irrita tellement l’empereur, que dans sa colère il ordonna que la cloche fût enlevée, et pendue au cou de son éléphant. Quelques jours après, revoyant cet animal avec un fardeau, qui était capable de lui nuire, il fit porter cette cloche à la place du katoual, où elle est demeurée depuis. Corgia passait pour excellent poëte. Il avait été élevé avec Schah-Djehan, qui prit du goût pour son esprit, et qui le comblait de richesses et d’honneurs ; mais ni les promesses ni les menaces n’avaient pu