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donner la jeune kenchany dont il était amoureux, et qui était debout derrière l’assemblée pour faire le salam avec toute sa troupe. Il avoua publiquement la violence de sa passion, et l’obstacle qu’il y avait trouvé. Tous les spectateurs rirent beaucoup de le voir réduit à souffrir par les rigueurs d’une fille de cet ordre. L’empereur, après avoir ri lui-même, ordonna qu’elle lui fût livrée, sans s’embarrasser qu’elle fût mahométane, et que le médecin fût chrétien. « Qu’on la lui charge, dit-il, sur les épaules, et qu’il l’emporte. » Aussitôt Bernard, ne s’embarrassant plus des railleries de l’assemblée se laissa mettre la kenchany sur le dos, et sortit chargé de sa proie.

Dans un si grand nombre de provinces, qui formaient autrefois différens royaumes, dont chacun devait avoir ses propres lois et ses usages, on conçoit que, malgré la ressemblance du gouvernement qui introduit presque toujours celle de la police et de la religion, en changeant par degrés les idées, les mœurs et les autres habitudes, un espace de quelques siècles qui se sont écoulés depuis la conquête des Mogols, n’a pu mettre encore une parfaite uniformité entre tant de peuples. Ainsi la description de tous les points sur lesquels ils diffèrent serait une entreprise impossible. Mais les voyageurs les plus exacts ont jeté quelque jour dans ce chaos, en divisant les sujets du grand-mogol en mahométans, qu’ils appellent Maures, et en païens ou gentous de