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ble embarras. Bernier raconte qu’on fut trois ou quatre jours à se dégager des torrens qui descendent des montagnes entre les bois, et de grandes herbes où les chameaux ne paraissaient presque point. « Heureux, dit-il, ceux qui avaient fait quelques provisions, car tout était en désordre ! Les bazars n’avaient pu s’établir. Les villages étaient éloignés. Une raison singulière arrêtait l’armée : c’était la crainte que le lion ne fût échappé aux armes de l’empereur. Comme c’est un heureux augure qu’il tue un lion, c’en est un très-mauvais qu’il le manque. On croirait l’état en danger. Aussi le succès de cette chasse est-il accompagné de plusieurs grandes cérémonies. On apporte le lion mort devant l’empereur dans l’assemblée générale des omhras ; on l’examine ; on le mesure ; on écrit dans les archives de l’empire que tel jour tel empereur tua un lion de telle grandeur et de tel poil ; on n’oublie pas la mesure de ses dents et de ses griffes, ni les moindres circonstances d’un si grand événement. » À l’égard de l’opium qu’on fait manger à l’âne, Bernier ajoute qu’ayant consulté là-dessus un des premiers chasseurs, il apprit de lui que c’était une fable populaire, et qu’un lion bien rassasié n’a pas besoin de secours pour s’endormir.

Outre l’embarras des chasses, la marche était quelquefois retardée parle passage des grandes rivières, qui sont ordinairement sans ponts. On était obligé de faire plusieurs ponts de bateaux