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drap d’or qu’il avait porté deux ou trois fois. On me le mit sur les épaules, et ce fut à contre-cœur que je lui en fis mes remercîmens. Cet habit aurait été propre à représenter sur un théâtre l’ancien rôle du grand Tamerlan. Mais la plus haute faveur que puisse faire un prince dans toutes ces régions est celle de donner un habit après l’avoir porté quelques fois. »

Le 16, l’empereur donna ordre qu’on mît le feu à toutes les maisons voisines du camp, pour obliger le peuple à le suivre. Les flammes se communiquèrent jusqu’à la ville, qui fut aussi brûlée. Il en faut conclure que des villes qu’on brûle si facilement ne coûtent pas beaucoup à bâtir.

Dans l’intervalle on fut informé de quelques circonstances qui regardaient le prince Cosronroé. Tout le monde continuait de prendre part à sa disgrâce, et gémissait de le voir remis en prison et retomber entre les mains de ses ennemis. L’empereur, qui n’y avait consenti que pour satisfaire l’ambition de son frère, sans aucun dessein d’exposer sa vie, résolut de s’expliquer assez hautement pour le mettre en sûreté et pour apaiser en même temps le peuple, qui murmurait assez haut de sa prison. Il prit occasion, pour déclarer ses sentimens, d’une incivilité qu’Asaph-Khan avait eue pour son prisonnier. Ce seigneur, qui était comme le geôlier du prince, était entré malgré lui dans sa chambre, et s’était