Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 7.djvu/139

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appartiennent tous au roi, la plus grande partie demeure en friche ; et qu’enfin le peuple y est si sobre, qu’un particulier qui peut gagner quinze ou vingt francs par an a plus qu’il ne lui en faut pour vivre.

» Après quelques éclaircissemens sur les monnaies de Siam, le roi, me mettant sur le chapitre de la religion, me demanda s’il y avait beaucoup de chrétiens dans ce royaume, et si le roi songeait sérieusement à se faire chrétien lui-même. « Sire, lui répondis-je, ce prince n’y a jamais pensé, et aucun mortel ne serait assez hardi pour lui en faire la proposition. » Il est vrai que M. de Chaumont, dans la harangue, qu’il lui fit lors de sa première audience, parla beaucoup de religion ; mais Constance, qui lui servait d’interprète, omit adroitement cet article. Le vicaire apostolique, qui était présent, et qui entendait parfaitement le siamois, le remarqua fort bien, quoiqu’il n’osa jamais en rien dire, crainte de fâcher ou de s’attirer l’indignation de Constance, qui ne lui aurait pas pardonné, s’il en eût ouvert la bouche. J’ajoutai que, dans les audiences particulières que M. de Chaumont eut pendant le cours de son ambassade, il en revenait incessamment à la religion chrétienne ; et que Constance, qui était toujours l’interprète, jouait en homme d’esprit deux personnages, disant au roi de Siam ce qui le flattait, et répondant à l’ambassadeur ce qui était convenable, sans que, de la part du roi ni de celle