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offenser le ciel et blesser la modestie s’ils les laissaient croître.

Après avoir ramé toute la nuit, les trois jésuites arrivèrent sur les dix heures du matin à Bancok. C’est la plus importante place du royaume, parce qu’elle défend le passage de la rivière par un fort qui est sur l’autre rive. L’un et l’autre côté étaient bien pourvus d’artillerie, mais peu fortifiés. M. de La Marre, ingénieur français, qui fut laissé à Siam, reçut ordre du roi de les fortifier régulièrement.

Depuis Bancok jusqu’à Siam, on rencontre quantité d’aldées ou de villages dont la rivière est bordée. Ce n’est qu’un amas de cabanes élevées sur de hauts piliers pour les garantir de l’inondation : elles sont composées de bambous, arbre dont le bois est d’un grand usage dans toutes les Indes. Le tronc et les grosses branches servent à former les piliers et les solives, et les petites branches à former le toit et les murailles. On voit près de chaque village un bazar ou un marché flottant, dans lequel ceux qui descendent ou qui montent la rivière trouvent toujours leur repas prêt, c’est-à-dire du fruit, du riz cuit, de l’arak, et divers ragoûts à la siamoise, dont les Européens ne peuvent goûter.

Le lendemain, troisième jour d’octobre, Tachard entra dans Siam, sept mois après son départ de Brest. Il se fit conduire d’abord à la maison du père Suarez, le seul jésuite qui fût alors dans cette ville, et de là au comptoir