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à l’extrémité du monde les inventions utiles et commodes du luxe européen.

Le père Suarez, jésuite portugais, âgé de soixante-dix ans, dont il avait passé plus de trente dans les Indes, n’était point en état de loger ses confrères, parce que son logement n’était composé que d’une chambre et d’un cabinet, tous deux si pauvres et si mal fermés, que les toquets, espèce de lézards fort venimeux, y étaient partout derrière ses coffres et parmi ses meubles. Le seigneur Constance faisait bâtir aussi pour les sept jésuites étrangers sept petites chambres et une galerie pour leurs instrumens. Près de cent ouvriers y étaient occupés, avec deux mandarins qui les pressaient nuit et jour.

Pendant qu’on poussait ces préparatifs avec la dernière ardeur, le roi fit partir deux des principaux seigneurs de sa cour, avec dix mandarins, chacun dans un ballon d’état, pour aller prendre celui qui était destiné à l’ambassadeur, et le conduire à l’entrée de la rivière. Il était magnifique, entièrement doré, long de soixante-douze pieds, mené par soixante-dix hommes de belle taille, avec des rames couvertes de lames d’argent ; la chirole, qui est une espèce de petit dôme placé au centre, était couverte d’écarlate et enrichie de brocart d’or de la Chine, avec des rideaux de même étoffe. Les balustres étaient d’ivoire, les coussins de velours, et le fond était couvert d’un tapis de Perse. Ce ballon était accompagné de seize au-