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à l’entrée de cette maison, il tomba sans connaissance. Son hôte le secourut avec un empressement et des soins dont il fut surpris. On ne l’aurait pas traité avec plus de bonté dans une ville d’Espagne. Il mangea quelques morceaux d’un poulet qui rétablirent un peu ses forces. Cet homme continua de le traiter avec des attentions admirables pendant toute la nuit. Il le fit coucher dans sa chambre et dans son propre lit qui était fort bon ; et le lendemain il ne voulut rien prendre pour sa dépense. « N’est ce pas beaucoup, dit Navarette, pour un infidèle ? Je l’ai dit plusieurs fois, ajoute-t-il, et je dois le répéter mille, cette nation surpasse toutes les autres en humanité, comme sur plusieurs points. »

Navarette rencontra à Tchang-tcheou un Chinois de la plus haute taille et de la plus terrible physionomie qu’il eût encore vue. Mais ce qui l’avait d’abord effrayé devint ensuite le sujet de sa consolation. Cet inconnu lui fit connaître par des signes qu’il n’avait rien à craindre, et qu’il devait se livrer à la joie. Dans l’hôtellerie où ils logèrent ensemble, il lui procura la meilleure chambre. À table, il lui fit prendre place à sa droite, et lui servit les meilleurs morceaux. En un mot, il prit autant de soin de lui que s’il eût été chargé de sa garde. Navarette prétend n’avoir jamais connu d’homme d’un meilleur naturel. Deux jours après, il fut joint par un autre Chinois, dont la bonté ne cédait en rien à celle du premier.