Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 8.djvu/138

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le moindre tort aux sujets de l’empire. Une armée entière traverse des villes et des villages sans y produire aucun désordre, et n’ose rien demander qu’elle ne paie au prix ordinaire. Navarette assure que l’année suivante un soldat eut la tête coupée pour avoir retranché un demi-sou du prix de quelques marchandises qu’il avait achetées. Les gens de guerre, suivant la maxime des Chinois, qui est passée d’eux aux Tartares, sont faits pour défendre le peuple et pour le garantir de tous les maux qu’il peut craindre de l’ennemi. Or, s’il en était menacé par ses propres défenseurs, il vaudrait mieux qu’il demeurât tout-à-fait sans défense, parce qu’il n’aurait alors qu’un seul ennemi, contre lequel il lui serait plus aisé de se défendre lui-même.

Arrivé à Fou-tcheou, capitale de la province de Fo-kien, il prit deux jours de repos. Il prétend que cette ville, quoiqu’une des moindres capitales de la Chine, contient un million d’habitans. Le faubourg par lequel il était entré n’a pas moins d’une lieue de longueur. La foule du peuple dans les rues est incroyable, sans qu’il paraisse une seule femme dans ce mélange. La rue qu’il suivit pour sortir est d’une largeur singulière, longue, nette, bien pavée, et bordée de boutiques où l’on trouve toutes sortes de marchandises. Il rencontra dans cette rue, à quelque distance l’un de l’autre, trois mandarins qui marchaient avec une gravité, une pompe et un