Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/296

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

—288— Les fusils, les cations, les bataillons sacrés Montant la garde autour des banques, Enfin les fous hurleurs, démagogues jurés. Jouant le peuple en saltimbanques. Vous nous donne\ (béni soit votre Nom divin) L'horrible détresse sans aide, La faim sans aliment, la faiblesse sans vin, Le feu des fièvres sans remède, Les cris de mort au fond des berceaux innocents, Les pleurs des femmes accouchées Et les délits honteux de nos adolescents Et de nos filles débauchées! Vous qui nous octroye\ les prostitutions Et les déshonneurs et les lèpres, Seigneur, Dieu des bontés et des compassions, Depuis matines jusqu'à vêpres Nous vous adorons, nous célébrons à genoux Votre sainte munificence; Vos dons miraculeux sont bienfaisants et doux, La peste même vous encense. Que tes séraphins blonds parfument avec soin D'oliban, d'encens et de myrrhe Nos prières, de peur qu'elles sentent le foin Du grabat où l'infirme expire, La débauche écœurante et les fades graillons Dans les gamelles refroidies, L'âcreté du trois-six, le fumet des haillons, La puanteur des maladies En commun, les relents du sommeil à plusieurs Dans les mansardes trop étroites, Et l'odeur de l'usine où les noirs travailleurs Fleurent la graisse et les chairs moites.