Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/397

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de ta bouche, et tant de prières se sont échappées de tes lèvres que le Seigneur eut pitié et t'exauça. Ainsi te fut-il permis de vivre dans le ravis sement et l'extase des visions célestes, oubliant les maux qui t'accablaient, pleine de joie et d'amour pour tous ceux qui vivaient autour de toi. Et tu ne sentais plus les ronces des sentiers ardus, et tu demandais toi- même de nouvelles épreuves pour fortifier ta constance et te rendre plus agréable à Dieu. Car dans la beauté de ton cœur tu ne te croyais pas digne de franchir les portes sacrées du divin séjour et tu l'implorais en tremblant qu'il voulut bien te recevoir parmi la foule silencieuse des anges qui son gent et font pénitence dans les vallées pleines d'ombre du purgatoire. Et par la volonté de Dieu qui sait tout, de nouvelles épreuves te furent envoyées, et le froid, la faim, la misère et les maladies assiégèrent ton pauvre corps débile ; mais la foi brillait en toi, comme une étoile visible des seuls élus et jour et nuit tu bénissais Dieu et le remerciais, voyant que les maladies te délivraient peu à peu de ton enveloppe charnelle. Déjà tu ne songeais plus à toi et tu priais ardemment pour les âme? de tes frères et sœurs les créatures, oublieuse de tous les maux, ne songeant qu'à leur salut ; les laudes et les cantiques avaient usé ta poitrine et tes lèvres, et assez de prières s'en étaient échappées pour couvrir le chemin de la terre au ciel. Et Dieu te bénit et il nous envoya, nous, les anges, pour t'emporter dans les vallées paradisiaques. Car toutes tes prières lui furent agrables et son infinie misé ricorde s'est étendue à tous ceux que tu as aimés. Ta piété t'a rendu tes enfants perdus, tous ceux que tu as pleurés et tous ceux pour qui tu l'as imploré ont été sauvés par toi et te serviront et te rendront grâces, célébrant tes vertus et ta louange, glorifiant la pauvre simplicité et la résignation par faite pendant toute leur vie éternelle. Par la grâce de Dieu sois bénie, et trans figurée par l'amour de notre Père tout-puissant et vis à jamais heureux, parmi nous les élus du ciel, dans les béatitudes infinies et les contemplations sereines au royaume de Dieu, notre Père et notre Seigneur. » En blanches mousselines, en vêtements plus élouissants que la neige et la rosée se sont transformés les haillons sordides qui recouvraient le corps de la pauvresse : les rides qui sillonnaient son visage ont disparu ; à chacun de ses pas s'ouvrent épanouies des fleurs nouvelles qui tremblent sur leurs tiges, vacillent et deviennent à la voûte du ciel de nouvelles étoiles rédemp trices des âmes terrestres ; ce pendant que la face se nimbe de sourires et de lumières et s'auréole d'immortelle sainteté, que tous les anges rassemblés autour d'elle chantent en chœur sa céleste glorification, et que par tout le paradis retentit le triomphe de la bienvenue et les immortelles louanges de la pauvreté.