Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/401

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—393— Ils évoquent, vos yeux, ces jardins de plaisance Où les riches passent l'été. Et dont les clairs jets d'eau enchantent le silence, Arrêtant le passant aux grilles d'or, charmé. Et cependant je vais Sous vos yeux scintillants de lumières loyales. Comme le voyageur perdu des forêts tropicales, Lourdes de nuit dense et d'aromes mauvais; Et cependant je vais, égaré, sous vos yeux, Sans qu'au delà de leur douceur pacifiante S'avive à mon regard l'aurore de vos deux, Ni sans qu'un mot de vous réponde. Par seulement une promesse indifférente, A mon espoir épris de vos prunelles blondes IV Assis auprès de mon esprit, Quel devin sournois, quel mauvais génie Paralysa mes virtuelles énergies; De ses breuvages affadis; Quel mauvais devin, quel traître génie Voulut me ramener par ses pervers accords A ces périples las ! plus tristes que la mort ? L'éphémère simplesse des lèvres, S'offrant pour mieux fuser un plus cruel mépris, Et le néant des suprêmes fièvres, Mon cœur n'a-t-il appris, Mon cœur n'a-t-il vagi aux sentes de ces ans Que saccagèrent au hasard de nomades serments? Les prés d'antan, les bois d'antan sont morts... Et si ma ville attarde encor quelque lumière Pour conjurer ses cimetières, Et si des bâtiments fantômes de mes ports Une chanson surgit, dolente d'elle-même, Ah! qu'elles se muent en anathème! 26