Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/402

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—394— Mes portes à triple chaîne, quelles se ferment, Inébranlables aux nouveaux assauts, Et que de mes remparts ne germe Nul implorant appel brisé vers les hérauts De l'ennemi qui veille dans la plaine. Et si vers mes formelles haines, Et si vers le vouloir de ma réclusion, Vers mes citadelles, d'indifférence cuirassées, Quelque caravelle fourbe arbore le guidon D'une paix exécrée... Ah ! si, renouvelant les défuntes intrigues, Elle forçait les eaux de ma réclusion, Je sais, je sais comment s'emporteraient les digues ! ALBERT ARNAY LITTÉRATURE HONGROISE POÉSIES D'ALEXANDRE PETOEFI I Mon imagination. 1 semble, à les entendre dire, — que mon imagination — ne plane qu'au-dessus de la plaine, — que jamais elle ne saurait s'élancer vers les hauteurs. — Certes, elle marche sur terre — quand cela lui plaît ainsi, — et elle descend même, parfois, dans les entrailles de la planète, — ou bien, à l'instar du plongeur, — elle s'enfonce dans la nuit éternelle — de l'océan le plus profond : dans les sombres abîmes du cœur humain. — Mais quand je lui ordonne : « Élance- toi vers les hauteurs », — elle s'élève incontinent dans les airs, — tendre et alerte comme l'alouette. — Et quand je lui commande : — « Plus haut encore, ô ma chimère », — alors elle prend son essor et fait la chasse à l'aigle — dont l'aile se lasse enfin, — mais elle ne se lasse jamais, — et se fraye la route — à travers les nuages les plus élevés. — Et même dans les parages des nues — elle ne s'attarde pas longtemps : — tout droit elle s'en