Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/407

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—399— fleur — qui fleurit là-haut au ciel. — Cela n'est pas vrai ! — L'homme est une fleur dont les racines — plongent dans le tréfond de l'enfer. — Ce fut un sage celui qui m'apprit cette vérité, — un sage et un sot aussi, car il creva de faim. — Pourquoi n'a-t-il donc pas volé et pillé? Ha, ha, hal Toutefois, pourquoi est-ce que je ris comme un possédé? — Ne devrais-je pas plutôt verser des larmes, pleurer parce que les hommes sont si mau vais ? — Dieu aussi pleure souvent de ses yeux de nuages — parce qu'il les a créé. — Mais à quoi sert la larme céleste? — Elle tombe sur la terre, sur la terre immonde, — les hommes marchent dessus... — Et qu'en devient-il? — Que devient la larme céleste?... Rien que de la boue? Ha,ha,ha! O ciel! vieux soldat licencié : — le soleil c'est la médaille sur ta poitrine, — et ton uniforme rapé — les nuages. — Hm! n'est-ce pas ainsi que l'on congédie un vieux guerrier? — Une croix et un vieil uniforme! Ha, ha, ha! Et dois-je vous traduire en langage humain — ce que signifie le chant du rossignol? — Il s'écrie : « Fuyez la femme! » — Les femmes attirent à elles les hommes — comme la mer les fleuves... — Pourquoi? Parbleu, c'est pour les engloutir ! — Une belle créature que la femme, — belle, oui, mais dangereuse : — un breuvage empoisonné dans une coupe d'or. — Je t'ai savouré, ô amour !... — Une seule goutte de ton nectar est plus douce — qu'un océan de miel, — mais une seule goutte de ce nectar est plus mor telle que l'eau de la mer transformée en poison! — Vîtes-vous jamais l'océan — lorsque la tempête y trace ses sillons — et y sème ses grains de mort? — Vîtes-vous déjà la bourrasque orageuse, — ce rustaud hâlé au soleil, — lorsqu'il agite l'éclair en guise de fouet? Ha,ha,ha! Quand le fruit est mûr, il tombe de l'arbre ; — toi, terre, tu es mûre aussi, — tombe donc! — J'attends jusqu'à demain encore. — Si demain le Dernier Jugement n'a pas lieu, — je creuse un trou jusqu'à ton centre, — je le remplis de poudre, — et je fais sauter en l'air le monde tout entier : Ha, ha, ha! VIII La Couronne de la Steppe. La steppe déserte ressemble — au front du vieux roi. — L'herbe : la chevelure de la steppe, — n'y croît que très clairsemée. — Le front porte