Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/449

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

—44'— en bon rang, ainsi que M. Braecke, dont les œuvres récentes marquent autant de pas en avant. M. Thys expose un excellent vitrail : une gracieuse figure blanche qui s érige comme un lys au milieu d'une guirlande de lys. La tonalité est charmante et le sertissage des lignes de plomb très bien entendu. Les tableaux et les dessins de M. Hannotiau qui évoquent en des sites brugeois l'âme d'une vieille ville déchue, solitaire et prosternée, se situent sur les confins de la réalité et du rêve. Nous y choisirons la Vesprée flamande, d'un beau caractère, Notre-Dame, d'un aspect saisissant, avec la masse terrifiante de sa tour et son ciel balafré de tragiques éclairs de lumières, et, dans une tout autre note, un intérieur en teintes vives dont la couleur chatoyante s'unit, comme dans un De Braekeleer, à un sentiment d'intimité recueillie. Parmi les artistes qui s'appliquent à transcrire la nature directement, les plus intéressants sont M. Lynen, observateur avisé et amusé, illustrateur verveux, M. Coppens, dont les fluides marines lumineuses, les clairs minuits lunaires manifestent les décisifs progrès, M. Dardenne, qui a une exposi tion abondante et variée : des paysages vifs et sonores, ou d'une douceur grise comme celui qui encadre dans un coin des dunes flamandes une Fuite en Egypte d'Yperdamme, des illustrations, des gais croquis d'une jolie grâce grêle. Les invités sont peu marquants. L'Erraticité de M. Chabas, où la vie humaine est symbolisée par une foule myriadaire noyée dans un nuage jaune, vert et bleu, groupe des nymphes banales dont le type ne convient pas plus que la couleur. Celle de M. Séon vaut mieux, encore qu'elle soit bien mince. Sa Douleur rappelle agréablement Puvis de Chavannes ; quant à sa Chimère, le peintre l'a douée d'un visage terriblement vulgaire et n'a rien ajouté à un modèle mal choisi. L'Etude de M. Filliger est un beau morceau, noble et superbe de lignes. Une des curiosités de l'exposition, les architectures de M . Trachsel, abstraites et géométriques, d'aucune matière, d'aucun climat, d'aucune humanité, des architectures d'ingénieur militaire, de constructeur de cuirassés, d'entrepreneur de monuments funèbres, cons tituent, selon nous, des tentatives avortées : à force de réduire les éléments suggestifs, l'auteur de ces épures bizarres ne suggérerait plus rien du tout s'il n'avait eu le soin et l'inconséquence d'appeler la couleur à son secours. L'ordonnance de ce premier salon du cercle Pour l'Art est irréprochable et calquée sur celle des expositions des XX, qui les premiers ont organisé chez nous des ensembles attrayants et rationnels. Nous ne pouvons, faute de place, mieux faire que de signaler brièvement, parmi les récentes expositions particulières : A la Galerie moderne, celle de M. Willem Delsaux : de fines et sincères notations de paysages, d'eaux et de ciels zélandais, un peu lourdes parfois, mais vivantes et spontanées. Au Cercle artistique, des œuvres de M. Frans Binjé, peintre robuste,