Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/72

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-64- jeunesse, comme à un recommencement-; en leur réapprenant de nouveaux points de départ, en les apurant de la matière morte qui s'attache à eux, alourdit leur marche et les enlise. Les révolutions qui ne font pas ce mou vement-là sont malfaisantes et le bien matériel qu'elles apportent est un appoint de mort. Le cri de liberté que pousse le troupeau sur la chaussée est un appel à la servitude. La liberté n'est pas dans la rue où la masse descend pour y traîner de vieux cris, de vieux chants et de vieux drapeaux ; car elle est le ferment de la vie et de toute initiative. Elle fuit les foules qui l'étouffent et l'éteignent. Elle a la couleur des matins purs, elle effleure les sommets ; les hommes s'y avancent à une si grande distance les uns des autres que s'ils s'aperçoi vent dans l'espace, leurs voix ne se touchent plus... Henry Maubel PAR L'AUTOMNALE NUIT... Par l'automnale nuit la terre se résigne, Muette sous le faix des ombres tumulaires. Nul astre en qui survive un espoir d'aubes claires, Un espoir de matin brisant son œuf de cygne. Les soleils disparus fermentent dans la vigne. Cependant au galop de noires haquenées, Sans faire gémir l'herbe ou résonner la roche, Tel qu'une chevauchée inexorable, approche Le troupeau saccageur des suprêmes journées. Un parfum triste vient des grappes condamnées. Demain l'or et le sang des étoiles sublimes Seront déshonorés par la soif de la horde : Mais voici qu'une pluie invisible déborde. Frémit et lentement ruisselle des abîmes. Serait-ce pas les dieux qui pleurent leurs vieux crimes?