—79— CHRONIQUE LITTÉRAIRE Episodes, Sites et Sonnets, par Henri de Régnier. Paris, Vanier. — Reliquaire, par Arthur Rimbaud. Paris, Genonceaux. — Poèmes, par Arthur Rimbaud. Paris, Vanier. — Journal des Destrée, par Jules Destrée. Bruxelles, Lacomblez. — Etude dejeune fille, par Henry Maubel. Bruxelles, Lacomblez. —- Les Apparus dans mes chemins, par Emile Verhaeren. Bruxelles, Lacomblez. otre ami et collaborateur M. Henri de Régnier publie chez Vanier, en une édition définitive, augmentée d'une kyrielle de sonnets inédits, ses Sites et ses Episodes. J'ai exprimé ailleurs (i) mon admiration pour l'auteur des Poèmes anciens et romanesques. J'attends sa nouvelle œuvre, Tel qu'en Songe, pour lui consacrer une étude sans redites. Parmi les jeunes poètes de l'école récente, M. Henri de Régnier est assurément le plus français dans le sens latin et classique du mot. Il est français par la belle ordon nance de ses poèmes, par sa vision harmonieuse et par la couleur franche de ses vers. Sa caractéristique Imaginative est une sorte de richesse mélan colique, qui s'apparente un peu, tantôt aux joailleries de M. Gustave Moreau, tantôt aux compositions allégoriques de M. Puvis de Chavannes. Une haute aristocratie de pensée s'accuse dans la moindre de ses œuvres. Son art est solitaire, dédaigneux, presque hautain, mais sans nulle effusion d'indignation ou de colère. Un sourire à demi méprisant s'esquisse parfois entre deux strophes, mais le poète ne se livre pas, et même, lorsque, dans les Entretiens politiques et littéraires, il passe de l'ode à la prose de propa gande, sa phrase a le geste rare et réservé. Quelques modifications apportées au détail du texte primitif, par exemple la suppression de certains mots de couleur souvent répétés, démontrent la rigide probité de l'écrivain. A peu près en même temps, quelques semaines avant le retour en France et la mort soudaine d'Arthur Rimbaud, parurent, chez Genonceaux, le Reliquaire, et chez Vanier, sous le titre inexact de Poèmes, une réimpres sion des Illuminations et d'Une Saison en enfer. L'édition du Reliquaire fut saisie à la requête du préfacier, M . Rodolphe Darzens, et menace de devenir rare. Il serait regrettable qu'il en fût ainsi, car l'édition Genonceaux ne mérite guère un tel honneur. La préface renferme, à elle seule, plus de coquilles qu'une plage à la marée basse. Et non seulement bon nombre'de vers sont défigurés, mais il est établi, par le témoignage de MM. Laurent Tailhade, Ernest Reynaud et Maurice Du Plessys, que Rimbaud n'est pas l'auteur du Limaçon, de Doctrine et des Cornues, les trois sonnets qui ferment le Reliquaire. La réimpression, chez Vanier, des Illuminationsmet d'Une Saison en enfer échappe heureusement à de telles critiques. Arthur Rimbaud a été placé par M. Paul Verlaine dans le Panthéon des (1) Voir la Société nouvelle du mois de septembre.
