Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/95

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-87- Thulédes Brumes, par Adolphe Retté. Bibliothèque artistique et littéraire de la Plume, 3i, rue Bonaparte, Paris. Un vol. petit in-i2 carré, tiré à 3i2 exemplaires, avec un portrait à l'eau forte par E.-H. Meyer. — Prix : 3 francs. Thulédes Brumes, sous ce titre joli, un coquet volume de M. Adolphe Retté qui s etait affirmé il y a quelques années par une notable suite de poèmes : Cloches en la Nuit, nous invite à de chimériques et subtiles son geries. Multiples stances, proses rutilantes et imprévues ainsi que des joyaux bizarres, parfois des vers de forte et de souple cadence, pour chanter à nouveau l'hymne par lequel Baudelaire glorifia les vertiges des paradis artificiels, « Circé radieuse et ses philtres opiacés ». Mais la Lune étant devenue par trop fréquentée, des étoiles impossibles requirent la fantaisie complexe de ceux d'aujourd'hui que tourmentait un désir d'être ailleurs. Au surplus étaient venus Rimbaud, Mallarmé, Laforgue et cet incohérent splen- dide Maldoror, des contrées du rêve les plus récents et magnifiques suzerains. M. A. Retté est le cousin de tous ces seigneurs. Il a traversé leurs domaines et y cueillit quelques graines dont il ensemença ceux qu'à son tour il élut dans l'espace, pour y être Prince, lui aussi : « Ecoute, il est un île si perdue au fond de la mer boréale... » Et quels délicieux et précieusement tarabiscotés spectacles auxquels mon esprit se complut, l'on peut voir dans les brumes, les crépuscules et les automnes de cette île de féerie ! Quelles agitations charmantes, adoucies et voilées de tristesse, de marionnettes un peu falotes ! Exquise scène, entre toutes, la danse des petites princesses en « robe d'espoir flambant », aux yeux inéclos, à qui un personnage écarlate tranche si fatalement le col ! [ Un autre soir.) Et les promenades sans lassitude dans Les bleus jardins du doux rien faire et du dormir Où des Chimères crachaient de l'or Dans le sangfigé des porphyres. Et d'autres, sans fin variées, d'autres aux images abondantes] dont le lyrisme çà et là se casse d'une ironie brusque; beaucoup de notations senti mentales déliées et alertes; avec cette particularité que l'auteur atteste l'inanité de Thulé et s'en exile : « Ah! l'étrange Pauvre s'éloigne qui vécut cette année néfaste... Je pressens des clartés inconnues qui m'éclaireront vers l'Idée bonne, avoue- t-il et il termine par ces vers : Aujourd'hui, je connais quellefut ma démence. Mon âme d'autrefois sommeille en son tombeau Et riche d'infini et vétu d'innocence. Je vais comme un enfant par des chemins nouveaux. JuLEs Destrée Le Sourire de Rams'es, par Gérard Lelong. Typographie SifTer, à Gand, in-8°;Jextrait du Magasin Littéraire, tiré à 27 exemplaires (25 hollande. 2 japon). La nouvelle de M. G. Lelong est remarquable et vraiment curieuse. Elle suffit à démontrer un tempérament artiste et raffiné, une réelle origi