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Page:La Justice du Var, année 6, n° 452 (extrait), 10 août 1890.djvu/3

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Mes chers Concitoyens,

Après une longue épreuve, je me présente devant vous.

C’est le sort des hommes politiques — je parle des hommes de combat — d’être exposés à toutes les surprises, à tous les attentats.

Autrefois on les assassinait, c’était l’âge d’or.

Aujourd’hui, contre eux l’entreprise réputée infâme paraît légitime ; contre eux le mensonge est vrai ; la calomnie, louange ; la trahison, loyauté.

Dans une démocratie où tous les appétits, tous les intérêts, toutes les passions sont publiquement aux prises, quoi de plus tentant que de profiter sans scrupules de tous les incidents pour chercher à troubler l’opinion par les attaques personnelles les plus violentes ? Et tous ceux qu’on aura pu redouter un jour seront exposés à subir ce qu’auront accumulé de sentiments inavouables, les appétits inassouvis, les intérêts menacés, les espérances trompées, les ambitions déçues.

J’ai lu que c’était un honneur d’être le point de mire de telles attaques, un honneur redoutable, qu’on ne peut affronter que cuirassé de haute indifférence, capable d’endurer tout sans défaillir, et toujours face à l’ennemi, jusqu’à ce que la fortune se lasse et fasse honte aux hommes. (Applaudissements).

Attaqué de tous les côtés à la fois, insulté, vilipendé, lâché, renié ; sous les accusations les plus infamantes, je n’ai pas faibli ; et me voici debout, devant vous pour qui j’ai subi ces outrages, prêt à vous rendre des comptes. (Appl. prolongés.)

Je ne vous ai jusqu’ici jamais parlé de moi.

Après plus de six mois d’attaques quotidiennes, qu’il me soit permis, pour cette fois, de me mettre en cause.

Depuis plus de trente ans, je suis un républicain de bataille.

En 1862, étudiant, j’étais en prison pour la République.