Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/102

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Dix minutes s’écoulèrent dans le plus profond silence ; puis les nègres embusqués se rejoignirent.

— Eh bien !… avez-vous vu quelque chose ? demanda le rohandrian de Manambaro.

— Deux Français. – Où sont-ils ? – Au milieu du troupeau. – Attendons !

Brise-Barrot et Le Camard rampaient dans la direction de Fanshère. Au lieu de réveiller et d’emmener les bœufs, ils s’éloignaient.

Le chef devine que sa ruse est éventée. Il pousse un cri. De tous les buissons, de tous les creux de rocher sortent des Malgaches armés de sagaies ou de massues. À un second cri, les, guerriers se mettent à battre les broussailles.

Un rayon de lune qui perça les nuages trahit tout à coup Brise-Barrot et le Camard :

— Nous sommes vus… – Et flambés… – À ce manguier, et dos à dos… – Bien !…

La défense désespérée des deux maraudeurs commença par une double décharge. Cent cris de guerre y répondirent.

Faire feu, tourner autour du tronc, se coucher à plat-ventre, puis se remettre à genoux, tirer encore, et gagner un autre arbre en rampant, telle fut la manœuvre exécutée avec autant d’audace que de succès par les deux aventuriers.

Mais le dernier manguier, sous lequel ils s’abritèrent, était sur la lisière du bois ; – le terrain qui l’environnait, isthme déblayé autant par les Français que par les insulaires, ne présentait aucun accident de nature à protéger la retraite.

— Grimpons dans les branches ! fit Brise-Barrot.

— Nous recevrons des flèches dans le dos ! c’est déshonorant !

— Imbécile !… regarde ! dit le canonnier, qui, s’il rampait comme Grand-Merci, grimpait comme Colifichet.