Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/144

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coup de canon l’ordre hissé à son mât de rester sous voiles.

Béniowski était alors en présence du gouverneur :

— Monsieur, lui disait-il, je n’ai cédé qu’à la violence ; je ne reconnais pas votre autorité. Mes ordres émanent du roi, et, à mon tour, je vous somme de ne pas entraver davantage ma mission.

M. de Ternay ordonnait à Béniowski de se constituer prisonnier.

— Pour éviter l’effusion du sang de mes soldats, je suis venu seul sur ce navire… Seul, maintenant, je suis en butte à votre inimitié ; je la brave, monsieur le gouverneur !… On n’aura mon épée qu’avec ma vie.

Il tirait l’épée à ces mots, et montait sur la dunette du brig.

— Aux armes ! commanda M. de Ternay.

M. Saunier, capitaine du Postillon, intervint respectueusement ; il essaya de faire sentir l’effet scandaleux de l’arrestation d’un colonel par les soldats de garde à son bord.

— Obéissez, Monsieur ! s’écria le gouverneur.

Mais, d’une voix tonnante, le commandant Kerguelen commanda de loin au capitaine du Postillon :

— Respectez la personne du colonel Béniowski !… À bord toutes les chaloupes chargées de troupes !

M. de Ternay pâlit de fureur, fit accoster son canot et se dirigea sur le Roland, où il allait à son tour trouver son maître.

Quant à l’intendant Maillart, il profita prudemment du tumulte pour se jeter dans une embarcation légère et gagner la côte.

Le sieur Vahis eut bien voulu en faire autant ; Béniowski l’en empêcha :

— Vous êtes sous mes ordres, monsieur le garde-magasin ; restez ici, je l’exige !