Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/213

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voiles déployées, apparaissait au large ; la brise était bonne ; encore quelques heures, elle mouillerait au bas de la rivière !

Tout à coup un cavalier, plus jaune et plus coriace que le Don-Quichotte de Cervantes, portant à son côté une effroyable rapière et jurant à faire peur au diable en personne, s’arrête sur les glacis.

— Le major ! le major ! Ah ! je suis sauvé ! s’écrie Venturel.

— Je prends le commandement de la place, mordious !… Allons ! la générale ! branlebas de combat ! mèche allumée !

— Y pensez-vous, commandant ? murmura le timide capitaine.

— Mille tonnerre de Madagascar ! à quoi diable voulez-vous que je pense ?

— Résister à une frégate et à des commissaires du roi !

— Je résisterais à tous les rois et à tous les empereurs, ampancasabes ou sultans de l’univers, mort de ma vie !… En attendant qu’on m’obéisse !…

Flèche-Perçante, Dian Rassamb, Jupiter, Vent-d’Ouest, cent Anossiens, tous en haillons, puis une troupe de déterminés grognards, Franche-Corde, Sans-Quartier, Jambe-d’Argent, Pic de Lannion, Moustique du Canada, Saur de Dunkerque, arrivèrent successivement à bride abattue ou au pas de course.

La Consolante, suivant les usages, saluait de vingt et un coups de canon le pavillon du roi arboré sur Fort-Louis.

— Commandant, dit l’adjudant Venturel, la frégate vient de saluer.

— Je l’ai, mordious ! entendu de mes deux oreilles ; je ne suis pas sourd !

— Je n’ai pas d’ordres pour rendre le salut.

— Qu’est-ce que ça vous fait ?

— Mais je ne puis tirer sans vos ordres, commandant.