Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/298

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hardis qui s’avançaient les premiers, sans ceux qui furent blessés en grand nombre. Ils se servirent si à propos de leurs armes qu’ils ne tiraient aucun coup de fusil sans effet, et quand trois ou quatre avaient tiré, les autres tiraient, pendant que ceux-ci chargeaient leurs armes. Leurs nègres jetaient hardiment des pierres et relançaient les dards qu’on leur avait jetés, et même la négresse amassait des pierres plein sa pagne pour leur en fournir et en jetait aussi.

« La poudre commençait à leur manquer ; ils se saisirent d’une petite colline toute ronde sur laquelle ils montèrent environ sur les sept heures du soir, bien las et recrus en résolution de jouer de leur reste, et y campèrent tout le reste de la nuit ; l’armée se tint aux environs, hors de portée de fusil. »

Un des douze braves soldats, nommé Nicolas de Bonnes, fut tué d’un coup de mousquet par les indigènes qui possédaient cinq armes à feu. Un autre Français, nommé Noiret, fut blessé au genou d’une balle, mais ne discontinua pas de combattre.

Le rohandrian Dian Tséronh, qui commandait les agresseurs, renonçant à employer la force contre des hommes si intrépides, leur envoya demander à parlementer et leur fit offrir des vivres qu’ils acceptèrent ; mais, mis en garde par leurs noirs fidèles contre la perfidie des ennemis, ils ne s’assirent pas et firent répondre au chef insulaire qu’ils étaient résolus à recommencer le combat.

Touché, cette fois, de tant de courage, Dian Tséronh ne chercha plus à leur tendre de piéges et congédia la plus grande partie de son armée.

François de Grandchamps, celui des soldats qui savait le mieux la langue du pays, s’avançait alors pour lui demander la cause des hostilités. Le prince rejeta tout le mal sur les calomnies des sorciers, qui l’avaient poussé à entreprendre une guerre injuste contre les chrétiens. Il voyait bien maintenant qu’ils avaient pour eux la protection de Dieu, qui leur avait donné la force de se défendre contre une si grande multitude. Il admirait d’autant plus leur hardiesse qu’ils étaient tous jeunes gens et qu’à peine deux d’entre eux avaient de la barbe au menton !