Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/299

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« Nous avons ouï parler des Portugais, poursuivit-il, nous avons connu les Hollandais et les Anglais ; mais ce ne sont point des hommes comme vous autres ; car vous ne vous souciez point de votre vie, vous la méprisez et en faites peu de cas, et quoique vous voyiez la mort devant vos yeux, vous ne vous épouvantez pas ; vous êtes autres que ces étrangers. Vous n’êtes pas des hommes, mais des lions, et quelque chose de plus. »

Après cette allocution, qui donne une idée de la haute opinion des indigènes pour la valeur française, Dian Tséronh laissa La Roche et ses compagnons reprendre librement leur chemin.

Ce ne fut pourtant pas sans avoir couru d’autres dangers que l’héroïque escouade, inquiétée encore dans sa marche par quatre cents indigènes, et forcée de revenir en arrière par la rencontre d’une rivière trop large et trop profonde, finit par arriver au Fort-Dauphin, où Flacourt désespérait de la revoir.

Les sept années du gouvernement de Flacourt sont sept années de luttes et de travaux incessants, pendant lesquelles il entra en rapports avec toutes les tribus du sud et de la côte orientale, depuis la baie Saint-Augustin, tombeau des Anglais, jusqu’à celle d’Antongil et à l’île Sainte-Marie, dont il s’était déclaré protecteur, et où il laissa une petite garnison.

Des déserteurs ou des aventuriers français s’établissaient sans cesse parmi les indigènes ; quelques-uns malheureusement furent traîtres envers leurs compatriotes ; mais la plupart se bornèrent à se naturaliser et à prendre rang parmi les Rohandrians, grâce à leur couleur et à leur intrépidité.

Au bout de cinq ans d’abandon de la part de la Société de l’Orient, Flacourt, réduit aux dernières extrémités, reçut enfin des secours inespérés, grâce au maréchal de la Meilleraye qui lui expédia deux navires avec une lettre où il se disait dans l’intention, clairement démontrée par ses actes, de se substituer seul aux droits de la compagnie, déjà plus qu’à demi ruinée et dont les priviléges expiraient.

Le capitaine La Forêt des Royers, commandant le Saint-Georges, se mit aux ordres de Flacourt, qui disposa tout d’abord de son autre navire, l’Ours, monté précisément par ce