ment se trouvait-elle à bord ? Que signifient les titres et qualités donnés à certains compagnons de Béniowski, officier français, interprète, chirurgien, soldat de Madagascar, ancien associé, etc. ? M. le commandant de la Pomone n’a point pris la peine d’essayer de résoudre ces questions préliminaires. Nous allons en porter la peine, messieurs les juges ; car, faute d’instruction préalable, notre tâche risque d’être extrêmement longue et compliquée.
Luxeuil recevait une leçon qui acheva de l’irriter.
Béniowski fut introduit.
À l’aspect du conseil de guerre, dont la composition lui offrait de véritables garanties de justice, il recouvra tout espoir. Il déclina donc ses noms et qualités avec calme, non sans jeter un regard de mépris au baron de Luxeuil. Après que le greffier lui eut donné connaissance de l’acte d’accusation et que le président lui eut accordé la parole :
— Je remercie le ciel, dit-il avec fierté, d’être enfin devant des juges éclairés et dignes de prononcer dans ma cause au nom du roi de France. Mais je l’espérais fort peu, je l’avoue, après l’accueil brutal qui m’a été fait à bord de cette frégate, lorsque je m’y suis rendu pour demander protection en ma double qualité de proscrit innocent et de naufragé.
Cet exorde motiva une brusque interruption du rapporteur :
— M. le président, s’écria-t-il, ce pirate m’insulte, et je…
— M. le rapporteur, ne passionnez point le débat ; les droits de la défense sont sacrés. Si l’accusé abuse de la parole, il n’appartient qu’à moi de le rappeler à l’ordre ou de le réduire au silence. – Accusé Béniowski, continuez.
— L’état-major et l’équipage entier de ce navire, reprit le général polonais, peuvent attester que M. le commandant de la Pomone s’est à peine enquis de mes noms et n’a rien fait pour s’assurer de mon identité. Trouvant singulier qu’un étran-