Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/64

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Kerléan, le commissaire royal, et les deux officiers de l’Aréthuse, ne dissimulaient pas leur satisfaction assez complétement pour que le baron ne s’aperçût de rien. L’enseigne de la Pomone, jeune renard de mer, eût volontiers donné six mois de sa solde pour n’être pas membre du conseil ; il ne put que baisser les yeux avec componction.

Quant à Béniowski, certain maintenant de ne plus être interrompu, il ne ménagea plus un homme qui devenait son ennemi mortel. – En conséquence, d’accusé, se transformant en accusateur, il accabla le commandant de la Pomone par l’exposé des derniers faits qui s’étaient passés à bord.

— Une jonque portant pavillon parlementaire et acceptant la remorque sans résistance, est capturée violemment. – Une frégate du roi de France s’éloigne du port de Manille, tandis que des navires du roi d’Espagne en sortent, et aucune explication de sa présence ne leur est donnée !

Le baron de Luxeuil, si protégé qu’il fût, se sentait fort mal à son aise ; ses chers patrons intriguaient à Paris ou à Versailles, l’Aréthuse et la Pomone naviguaient dans les mers de la Chine, le commandant Cerné de Loris était en ces parages beaucoup plus roi que Sa Majesté Louis XV, et tous les favoris de l’univers ne l’empêcheraient point de déployer sa sévérité, s’il se laissait persuader par le maudit Béniowski…

— Ah ! que ne l’ai-je fait pendre ! se disait le baron, j’en aurais été quitte pour huit jours d’arrêt.

Cet a parte achève de donner une idée de la moralité du jeune et bel officier de cour, dont le dépit ne touchait pas à son terme ; car le chevalier du Capricorne, Vasili, les officiers de la Douairière, et quelques autres accusés ayant successivement comparu, le président du conseil de guerre déclara qu’il suspendait l’interrogatoire pour entrer en délibération.

Le chevalier du Capricorne fut amusant comme toujours ; il