Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/73

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Toutes les préventions des gens du bord se dissipaient ; les combats, les aventures héroïques de Béniowski et des siens, excitaient tour à tour l’admiration ou l’enthousiasme. Il n’était fils de bonne mère, désormais, qui ne blâmât énergiquement la conduite odieuse du baron de Luxeuil.

— Un freluquet ! un talon rouge ! un museau rose ! un courtisan ! une espèce de polichinelle galonné ! un officier par protection ! une jeune baderne !

Il était anathématisé par ses subalternes, et sa dureté excitait à cette heure une indignation presqu’égale à celle que faisait naître le récit des innombrables méfaits de Stéphanof.

Matelots, soldats, passagers, tous déploraient avec une égale sincérité la perte du vicomte de Chaumont et celle d’Aphanasie, l’étoile du Saint-Pierre et Saint-Paul, la fille du général, la fiancée de son ami, l’ange de paix et de réconciliation, quand tout-à-coup un cri de joie s’échappa de la poitrine de Béniowski.

— Elle ! Aphanasie !… Ô mon Dieu !… Est-ce bien possible ?… disait-il avec transports.

Cent cris de victoire répondirent au cri poussé par le général. L’équipage de la Pomone salue, applaudit et ne peut retenir des hourras.

Les associés et marins du Saint-Pierre et Saint-Paul se précipitent au-devant de la jeune fille.

Elle est dans les bras de Béniowski, qu’elle nomme son père.

— M. le comte, dit le commandant en chef, rendez grâces à Mademoiselle ; c’est à elle surtout que vous devez d’avoir été entendu avec impartialité, car elle n’a cessé depuis hier de combattre les préventions injustes qui m’animaient moi-même contre vous !

— Mais par quel miracle, ô mon Dieu ! ma fille m’est-elle rendue ?