Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/90

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France daigne m’ouvrir les bras, qu’elle m’adopte pour un de ses enfants, et, fuyant à jamais l’Europe, je me consacrerai avec bonheur à la servir dans ces régions lointaines. Je lui ferai de Madagascar une colonie immense, une véritable France orientale.

— Sandis ! Cadédis ! interrompit gaiement le chevalier Vincent du Capricorne, vous marchez sur mes brisées… Mais être le second sous vos ordres, vaut mieux que d’être le premier tout seul !… Je ne suis pas jaloux, moi !… Vive Madagascar ! Vive la France !… Faisons pièce aux Anglais ; je vous abandonne les Russes !

Béniowski serra la main au digne chevalier Vincent, et, reprenant l’exposition de ses desseins :

— L’intérêt commercial de la France, ma nouvelle patrie, s’oppose aux projets de colonisation que j’avais formés pour un important territoire de Formose, qui d’ailleurs, en cas de guerre, est trop exposée. Ici la France possède d’excellents ports ; les deux grandes Mascareignes lui appartiennent ; le Fort-Dauphin est au roi. Les Hollandais du Cap de Bonne-Espérance et les Portugais de Mozambique ne sont pas de force à contrarier nos conquêtes. Les Séchelles et les Comores seront nos postes avancés, et les Indes Méridionales, dont Madagascar est le continent, deviendront le plus beau fleuron de la couronne. Oui, monsieur le gouverneur, avec le concours d’administrateurs éclairés, tels que vous, avec des marins comme messieurs Cerné de Loris et de Saint-Hilaire, des soldats aussi valeureux que mon ami le chevalier, je ne craindrai pas d’affirmer qu’avant peu d’années j’aurai fait de la grande île de Madagascar tout entière et des archipels voisins autant de terres françaises.

Le gouverneur hocha la tête à cet exposé enthousiaste des immenses desseins de Béniowski.