Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/97

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Grand-Merci, le gros serpent croque-rat auquel le chevalier destinait pour niche le splendide dragon de Formose, était présentement enroulé autour de la jambe gauche du sergent ; de là, il guettait quelque proie ; mais les lézards, les araignées et les bêtes à mille pattes devenaient de plus en plus rares aux alentours des fortifications.

Grand-Merci bâillait et sifflait à faire pitié.

Quant à Colifichet, le gentil lémurien qui avait la grosseur d’un chat de grande taille, courait et bondissait avec une agilité merveilleuse, et devait à une éducation très-avancée une foule d’agréments, en ce moment, il jouait avec le chapeau du mélancolique sergent ; mais il avait beau déployer ses grâces, sauter, faire des passes, grimacer et attraper les petits insectes de l’air le plus divertissant, il ne parvenait point à le dérider.

Sérieux comme Marius sur les ruines de Carthage, affligé comme Calypso après le départ d’Ulysse, Franche-Corde se lamentait de plus belle avec une voix bien digne d’émouvoir les échos malgaches

— N, i, ni, fini ! – Frits ! fricassés, cuits, coulés, enfoncés, chavirés, envasés, déralingués, coincés !… Bernicotte ! Bleu de ciel !… voilà donc notre part… Pendant que les flibustiers et les pirates de la Providence ont eu la chance à contre ! C’est le Fort-Dauphin qui nous a porté malheur !

— M’est avis, dit-il à ses camarades, que notre pauvre capitaine a laissé ses os quelque part ou ailleurs.

— Dommage ! firent tous les soldats, grand dommage !

— Dommage qu’il nous ait plantés ici où nous ne reverdissons guère ! murmura Colletti, le Napolitain.

— Connu, mais… après ? demanda Brise-Barrot, ex-voltigeur de Royal-Marine.

— Nous n’avons plus de tafia, continua le sergent, nous