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TRILBY

I


« Mimi Pinson est une blonde
Une blonde que l’on connaît.
Elle n’a qu’une robe au monde !
Landérirette, et qu’un bonnet ! »


C’était une de ces belles matinées ensoleillées qu’avril ramène à Paris et que de tièdes ondées embaument de leurs, senteurs troublantes.

La grande fenêtre entr’ouverte laissait pénétrer une brise légère dans
Mimi Pinson est une blonde !
l’atelier encore dans tout le désordre de son installation. Un grand piano de Broadwood avait été expédié d’Angleterre, un demi-queue qui, fraîchement accordé, reposait déjà contre le mur. Une panoplie de fleurets, masque et gants d’escrime, lui faisait face. À une grosse poutre du plafond pendaient un trapèze, une corde à nœuds et des anneaux.

Des moules de plâtres ; bras, jambes, mains, pieds, une face de Dante, l’alto-relievo de Léda et le cygne de Michel-Ange, un centaure et Lapith d’après les marbres d’Elgin, sur lesquels la poussière n’avait pas encore eu le temps de se poser, relevaient la teinte un peu sombre des murs tapissés de papier grenat. Des études à l’huile, nudités copiées du Titien, de Rembrandt, Vélasquez, Rubens, Tintoret, Léonard de Vinci — aucune de l’école de Botticelli ou de Montegna, deux maîtres encore ignorés du public.

Une large planche courait, le long des murs, supportant d’autres modèles en plâtre, en terre cuite ou en imitation de bronze ; un Thésée, une Vénus de Milo, un petit discobole ; un homme