Page:La Madelène - Le comte Gaston de Raousset-Boulbon, sa vie et ses aventures, 1859.djvu/47

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clairvoyants pressentaient des luttes sanglantes. Partout la guerre était dans l’air, mais plus que partout peut-être, dans ce terrible Midi, la politique allait devenir une guerre de personnes, et les provocations individuelles allaient remplacer les discussions de principes.

Les républicains de vieille roche, soupçonneux, jaloux, considéraient la République comme leur propriété exclusive. Au lieu d’accueillir les nouveaux venus, les convertis d’hier et de demain, ils resserraient leurs rangs et s’isolaient insensiblement dans le pays. Au lieu de devenir l’universalité des citoyens, ils ne furent bientôt qu’un parti : or, les partis ne peuvent se passer d’hommes, et les hommes devaient manquer au parti démocratique comme aux autres,

M. de Raousset se jeta résolument au plus fort de la mêlée, et son journal, tout personnel, se fit bientôt remarquer par la vivacité de ses attaques. Pendant un an, il resta sur la brèche, harcelant tour à tour les blancs, les bleus, les rouges, et essayant de fonder un parti nouveau, sans passé, tout à l’avenir. La nature de ce recueil ne nous permet pas de donner ici, comme nous l’aurions désiré, des extraits de ses articles politiques, nous dirons seulement que la presse réactionnaire, dans le sens que les querelles de partis ont attaché à ce mot, est bien loin de nous avoir accoutumés à l’indépendance et à la fierté de langage qui distinguent la Liberté, parmi tous les journaux nés de l’ébranlement de février.

M. de Raousset avait dit vrai en niant être l’homme d’aucun parti ; on le lui prouva. L’amertume de sa polémique le fit repousser par les républicains, l’audace de ses idées par les royalistes. Il échoua une troisième fois