Page:La Madelène - Le comte Gaston de Raousset-Boulbon, sa vie et ses aventures, 1859.djvu/74

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matin, devant la compagnie entière, sous les armes, je dégradai et chassai honteusement cet homme… C’était un Belge… »

Pour l’intelligence de ce qui va suivre, il nous semble indispensable de dire en quelques lignes ce qu’était l’État de Sonore, au moment où la petite troupe française y mettait le pied.

La Sonore a été longtemps la plus riche et la plus florissante des provinces mexicaines. Elle s’étend entre la mer Vermeille et la Sierra-Madre, entre le 27e et le 33e degré de latitude. Qu’on se figure un archipel dont les îles seraient des montagnes, dont la mer serait une plaine ; telle est, malgré l’audace de la comparaison, la physionomie réelle du pays. Fermée au nord par un assemblage de montagnes agglomérées sans ordre par des convulsions volcaniques, la Sonore n’a pas cet aspect d’ensemble qui caractérise les grandes sierras. Deux pentes principales se réunissent à des plateaux supérieurs qui, du golfe de Corte, vont joindre la Sierra-Madre. Au nord, elles descendent vers le Rio-Gila ; au sud, elles se confondent avec les plaines inférieures de la basse Sonore. À travers ces montagnes circulent des vallées larges et fertiles, arrosées d’eaux vives, ombragées d’arbres superbes, où croissent, côte à côte, les produits de toutes les zones. Le blé, la canne à sucre, la vigne, l’oranger, tout fleurit et mûrit dans le même sillon. Le cotonnier est indigène sur les rives du Rio-Gila et du San Pedro, dans ces mêmes contrées où la tradition place les palais des Astèques, les palais aux toits d’or et aux portes d’argent. Tous les métaux, sans exception, ont été jetés pêle-mêle dans la fournaise ardente de ses sierras. L’argent, ainsi