Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome premier, 1796.djvu/82

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ceau. Ils ont été jetés au même moule, dit un grand théologien[1] qui a oſé penſer. Celui qui voudra connoître les propriétés de l’ame, doit donc auparavant rechercher celles qui ſe manifeſtent clairement dans les corps, dont l’ame eſt le principe actif.

Cette réflexion conduit naturellement à penſer qu’il n’eſt point de plus ſûrs guides que les ſens. Voilà mes philoſophes. Quelque mal qu’on en diſe, eux ſeuls peuvent éclairer la raiſon dans la recherche de la vérité ; oui, c’eſt à eux ſeuls qu’il faudra toujours revenir, quand on voudra ſérieuſement la connoître.

Voyons donc, avec autant de bonne foi que d’impartialité, ce que nos ſens peuvent découvrir dans la matière, dans la ſubſtance des corps, & ſur-tout des corps organiſés ; mais n’y voyons que ce qui y eſt, & n’imaginons rien. La matière eſt par elle-même un principe paſſif, elle n’a qu’une force d’inertie ; c’eſt pourquoi toutes, les fois qu’on la verra ſe mouvoir, on pourra conclure que ſon mouvement vient d’un autre principe, qu’un bon eſprit ne confondra jamais avec celui qui le contient, je veux dire, avec la matière ou la ſubſtance des corps, parce que l’idée de l’un & l’idée de

  1. TERTULLIEN de reſſurect.