Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome second, 1796.djvu/136

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les gens bien nés, non-feulement d’une volupté, mais d’un defir ou même du moindre appétit qui les flatte : c’eft que vous n avez pas la plus légère jd Je de cette vertu , qui tiro’u fi joliment torcUlc île Séneque. Semblable à Tenant courageux qui donne , fans le favoïr , des coups de pied à la mère qui le porte Se le nourrit , notre amc ne regimbe pas moins dans fa matrice , avec une agréable confciencc contre ce qui la délede le plus.

D’où vient cette différence entre Finflinâ des animaux & la raifon humaine ? Ceft que nous pouvons juger des chofes en elles-mêmes ; leur efiênce & leur mérite nous font trop connus, pour être, dans tous les âges de la vie , esclaves & dupes de leurs illufions, au lieu que les bêtes nont la faculté de juger que fur un rapport , que le père Mallebranche a décidé toujours trompeur. Comment feroient-elles capables de fèntir ce fingulier prurit de l’amour-propre , ce noble aiguillon de la vertu , qui nous élevé au faîte de l’art fur les débrig de la nature ? Ce font de vraies machines, bornées à fuivre pas à pas cette nature , dont le torrent les entraîne irréfiftiblement 9 femblables à de légères chaloupes fans pilote & fans avirons, abandonnées au gré des vents & des flots. Enfin faute d’une brillante éducation , dont elles ne font point fufceptiblcs , elles font dépourvues de ce