Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome second, 1796.djvu/220

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connoit-elle le danger, où l’honneur, où ſon roi l’appelle ? la volupté d’Epicure n’eſt qu’une robe de femme ſur un corps robuſte, comme leur dit figurément notre auteur ; ne puis-je pas dire dans le même ſens, que nos ſeigneurs François portent le courage d’Hercule, dans les habits d’Omphale ? Voltaire, & tous ceux qui connoiſſent la nation, ne me démentiront pas. Voici comment l’a peint ce beau génie :

Des courtiſans François tel eſt le caractere,
Du ſein de la molleſſe ils courent aux haſards ;
Vils flatteur à la cour, héros aux champs de Mars.

Séneque ne défend pas abſolument l’uſage de la volupté. Vous connoiſſez ces bluets, image du vaudeville pour la durée, ornemens de Cérès, que le haſard des graines & des vents fait naître au milieu des bleds la volupté, inſinue-t-il, croît ainſi quelquefois ſur les pas d’un homme vertueux ; il peut la cueillir, lorſqu’elle ſe préſente, ſans qu’il la cherche, comme on cueille une fleur en paſſant. Suivant cette idée, la volupté ſeroit donc la fleur de la vertu, comme l’eſprit du plaiſir ; elle germeroit dans ſon ſein d’autant plus belle & plus pure, & plus vierge, ſi l’on me permet cette expreſſion chymique.

Ce n’eſt pas tout-à-fait défendre l’uſage d’une