Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome troisième, 1796.djvu/173

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Le poids de l’univers n’ébranle donc pas un véritable athée, loin del’écraser ; & tous ces indices mille & mille fois rebattus d’un créateur, indices qu’on met fort au-dessus de la façon de penser dans nos semblables, ne sont évidens, quelque loin qu’on pousse cet argument, que pour les antipyrrhoniens, ou pour ceux qui ont assez de confiance dans leur raison, pour croire pouvoir juger sur certaines apparences, auxquelles, comme vous voyez, les athées peuvent en opposer d’autres peut-être aussi fortes, & absolument contraires ; car si nous écoutons encore les naturalistes ; ils nous diront que les mêmes causes qui, dans les mains d’un chymiste, & par le hazard de divers mêlanges, ont fait le premier miroir, dans celles de la nature ont fait l’eau pure, qui en sert à la simple bergère ; que le mouvement qui conserve le monde, a pu le créer ; que chaque corps a pris la place que sa nature lui a assignée ; que l’air a dû entourer la terre, par la même raison que le fer & les autres métaux sont l’ouvrage de ses entrailles ; que le Soleil est une production aussi naturelle, que celle de l’électricité ; qu’il n’a pas plus été fait pour échaufer la terre, & tous ses habitans qu’il brûle quelquefois, que la pluie pour faire pousser les grains, qu’elle gâte souvent ; que le miroir & l’eau n’ont pas plus été faits pour qu’on pût s’y regarder, que tous les corps polis qui ont la même propriété : que l’œil