Page:La Mettrie - L'homme machine, 1748.djvu/77

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ne pas sentir ce qui affecte l'intérieur de notre Etre. Nous savons que nous pensons, & que nous avons des remords; un sentiment intime ne nous force que trop d'en convenir; mais pour juger des remords d'autrui, ce sentiment qui est dans nous est insuffisant: c'est pourquoi il en faut croire les autres Hommes sur leur parole, ou sur les signes sensibles & extérieurs que nous avons remarqués en nous-mêmes, lorsque nous éprouvions la même conscience & les mêmes tourmens.

Mais pour décider si les Animaux qui ne parlent point, ont reçu la Loi Naturelle, il faut s'en rapporter conséquemment à ces signes dont je viens de parler, supposé qu'ils existent. Les faits semblent le prouver. Le Chien qui a mordu son Maître qui l'agaçoit, a paru s'en repentir le moment suivant; on l'a vû triste, fâché, n'osant se montrer, & s'avouer coupable par un air rampant & humilié. L'Histoire nous offre un exemple célèbre d'un Lion qui ne voulut pas déchirer un Homme abandonné à sa fureur, parce qu'il le reconnut pour son Bienfaicteur. Qu'il seroit à souhaiter que l'Homme