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LA VIE


toûjours fort éloignée de l’air décisif des Dogmatiques. »

Quoiqu’il aimât beaucoup la tranquillité, ainſi que la plûpart des Gens de lettres. La retenuë, dont il faiſoit profeſſion, ne laissa pas d’eſſuïer une legère alteration. L’Académie dès son établiſſement s’étoit attachée à polir, à fixer, à reformer la langue Françoiſe. Mr. le Vayer avoit déjà un bon nombre de ſes ouvrages, auxquels il avoit travaillé dès long tems. Il ne vit pas volontiers, qu’un Etranger, un Gentilhomme Savoyard, Mr. de Vaugelas de la Famille des Barons de Peroges, qui tient encore aujourd’hui un rang diſtingué à Annecy, eut publié ses remarques ſur la langue Françoiſe ; en les adoptant il ſe voioit dans une eſpèce de néceſſité de repaſſer tout ce qu’il avoit écrit, d’y faire bien des changemens & des corrections, ſoit pour le style, ſoit pour les expreſſions, ſoit pour l’Ecriture ; & de la même maniere on a beau déclamer contre ceux, qui les premiers changent quelque choſe à l’orthographe ; elle eſt l’image des ſons & elle change comme eux, à la vérité un peu plus lentement « Mr. le Vayer ne put s’empêcher d’écrire contre ces Remarques non ſeulement plusieurs lettres, mais un Volume entier, où il ſe plaint fortement de la contrainte & des entraves que Mr. de Vaugelas donne au Stile de tous les Ecrivains par ses Remarques, qu’il prétend être pour la plûpart ou fauſſes ou inutiles. Quoique Mr. de Vaugelas ait eu une très grande raison de s’opposer à la corruption du langage & aux vicieuses façons de