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DE LA VERTU DES PAYENS.


les Hébreux, qui attendoient le Meſſie, & ſe promettoient la venue du Sauveur du Monde ; il s’enſuit que les Païens, Gentils & Idolâtres, qui n’ont jamais eu ni l’une, ni l’autre Foi, & qu’on nomme pour cela infideles, ne peuvent en aucune façon s’être rachetés de la peine du pèché originel, ni de celle de leurs fautes. Et ainſi nous ſerons obligés de conclure, qu’aucun de ce grand nombre de Païens, pour ſages & pour vertueux qu’ils aient été tenus, n’a dû croître le nombre des Ellûs, ni participer à la Beatitude éternelle.

Si eſt-ce que beaucoup des Saints Peres, & un très grand nombre de plus graves Docteurs tant anciens que modernes, ont eu une opinion toute contraire. Ils tombent bien d’accord de la premiere propoſition, comme étant conforme à ce que prononça ſi hardiment Saint Pierre dans Jeruſalem[1], qu’il n’y a point de nom ſous le Ciel, qui nous puiſſe racheter, & qui ſoit en effet le ſeul principe de nôtre ſalut, que celui de Jeſus Chriſt. Mais en expliquant la ſeconde, ils ſoutiennent, que ni tous les Païens, ni tous les Gentils des Latind, qui ſont les Ethniques des Grecs, n’ont pas été Infideles, de même qu’ils non pas été non plus tous Idolâtres, la plûpart au contraire aiant poſſedé une Foi tacite & envelo-

  1. Act. c. 4. art. 10.