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DE LA VERTU DES PAYENS.


ſont laiſſés conduire à la lumière naturelle, aidée ſans doute de la grâce, & que comme parle l’Apôtre[1], ils ont été une Loi eux mêmes ; ceux là, dis-je, ne doivent pas être condamnés aux peines éternelles comme ſont les méchans, & il eſt bien plus croiable, qu’ils ont reçu la récompense promiſe aux juſtes.

En effet, outre que les Païens ont eu les vertus Morales & intellectuelles, comme nous l’avons expliqué dès le commencement de ce Diſcours, on peut dire qu’ils n’ont pas été entièrement dépourvus de celles que nous nommons Théologales, & qui nous viennent par infuſion Divine, pour une fin ſurnaturelle. Car nous avons déja vu que Saint Thomas leur accorde la Foi envelopée. On ne ſauroit douter, qu’en contemplant la bonté de Dieu, ils n’aient eu l’eſperance qu’il leur feroit miſericorde : Et ils n’ont pas été ſans charité, puiſqu’ils n’ont pû donner les attributs de toute bonté au ſouverain Etre, comme ils ont fait, ſans l’aimer ſur toutes choſes. Auſſi n’y auroit-il point d’apparence d’avoüer, qu’ils euſſent bien eu un amour parfait pour leur patrie & pour leurs amis, ce que leurs Hiſtoires nous forcent de croire, & de leur dénier celui de Dieu qui eft beau-

  1. Ep. ad Rom. 2. c.