Page:La Motte-Fouqué - Ondine, Hachette, 1913.djvu/146

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n’hésitait pas à encourir les reproches de Bertalda, la serra dans ses bras avec amour.

— La pierre restera où tu l’as fait mettre, dit-il, et tout sera réglé ici selon ta volonté, ma chère femme adorée.

Ravie d’entendre enfin les mots d’amour qu’elle attendait en vain depuis si longtemps, Ondine reprit, après avoir rendu au chevalier ses caresses :

— Mon doux seigneur, j’oserai t’adresser une prière, puisque je te retrouve aimant et tendre. Songe, ami, à ce qui se passe parfois, en été : au milieu d’une journée radieuse, on voit soudain le ciel éclatant se couvrir de nuages, comme d’une couronne où brillent les éclairs, où gronde la foudre. C’est alors que l’été semble le roi, le dieu de la terre. Il en est de même pour toi. Lorsque je t’ai mécontenté, ta voix gronde et tes yeux lancent des éclairs. Tu me sembles encore plus beau et plus grand, mais ensuite je pleure. Je t’en supplie, évite de te montrer ainsi courroucé contre moi quand nous serons près d’un fleuve, d’une fontaine ou d’un lac. Mes parents reprendraient alors sur moi le droit qu’ils ont perdu, et m’arracheraient à toi, indignés d’entendre offenser une des leurs. Ils m’obligeraient à vivre auprès d’eux, loin de toi, dans leur palais de cristal, et jamais plus on ne me permettrait de te revoir. Ou bien, si par malheur ils me renvoyaient vers toi, alors, ô mon bien-aimé ! ce serait pour une mission effrayante ! Sois doux et bon pour ta pauvre Ondine. Hélas ! si tu savais ce que causerait la perte de ton amour !