XV
CE QU’IL ADVINT AU CHEVALIER HULDBRAND
DOIT-ON se réjouir ou se plaindre de ce que nos douleurs
ne soient pas éternelles ? Certes, il existe des êtres dont
l’âme reste unie au souvenir de l’être aimé jusqu’au
dernier souffle. Et pourtant, ceux-là même ne ressentent
pas longtemps le vide absolu des premiers jours. Peu à
peu, des pensées étrangères se glissent entre eux et leur
chagrin ; l’instabilité de toutes les choses humaines se
reconnaît jusque dans la douleur. Il faut donc plutôt
déplorer que nos deuils n’aient pas de longue durée.
Il en alla ainsi pour le sire de Ringstetten ; la fin de cette histoire nous dira si ce fut pour son bien. Les premiers temps, il se montra inconsolable, versant des pleurs aussi amers que ceux de la pauvre Ondine quand il lui avait arraché le collier. Il revoyait le geste gracieux et touchant de la jeune femme offrant la parure à son amie ; son